Location meublée non professionnelle : rappels et réforme sur les amortissements
Par
Me Fabrice Michel
10 mai 2025
•
5 min de lecture
Comprendre les enjeux et les évolutions réglementaires
Introduction
La location meublée non professionnelle (LMNP) représente depuis de nombreuses années une option privilégiée par de nombreux investisseurs immobiliers souhaitant diversifier leur patrimoine tout en bénéficiant d’une fiscalité avantageuse. Toutefois, le cadre fiscal de ce statut connaît une évolution majeure avec la réforme portant sur la réintégration des amortissements lors de la revente du bien. Dans ce billet, nous allons rappeler les principes fondamentaux du régime LMNP, ses avantages et ses contraintes, puis détailler la portée de la récente réforme.
Le régime de la location meublée non professionnelle : principes et fonctionnement
Définition de la LMNP
La location meublée non professionnelle désigne une activité dans laquelle une personne met à disposition d’un tiers un logement garni de meubles en nombre et qualité suffisants pour permettre au locataire d’y vivre immédiatement avec ses seuls effets personnels. Pour bénéficier du régime LMNP, le propriétaire ne doit pas tirer plus de 23 000 € de recettes locatives annuelles de cette activité, ni que ces revenus dépassent les autres revenus d’activité du foyer fiscal.
Statut du loueur
Le statut de LMNP est accessible à toute personne physique ou société civile n’agissant pas à titre professionnel. Par opposition au régime de Loueur en Meublé Professionnel (LMP), le LMNP se caractérise par une démarche patrimoniale et une implication souvent moindre dans la gestion quotidienne.
Obligations liées à la location meublée
• Le logement doit être décent et proposer un inventaire de mobilier répondant à la liste légale minimale (literie, plaques de cuisson, réfrigérateur, ustensiles, etc.).
• Le bail peut être conclu pour un an renouvelable (ou 9 mois pour un étudiant).
• Le propriétaire doit déclarer l’activité auprès du Greffe du Tribunal de Commerce (obtention d’un numéro SIRET).
Régime fiscal applicable
Les revenus issus de la location meublée sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et non en revenus fonciers comme pour la location nue. Deux options de fiscalité s’offrent au bailleur :
• Le régime micro-BIC : Il s’applique de plein droit si les recettes annuelles n’excèdent pas 77 700 €. Un abattement forfaitaire de 50 % est pratiqué sur les loyers perçus, sans possibilité de déduire les charges réelles.
• Le régime réel : Sur option, ou si les recettes excèdent le seuil du micro-BIC, le propriétaire peut déduire l’ensemble des charges réelles (intérêts d’emprunt, travaux, charges de copropriété, frais de gestion, taxes, etc.) ainsi que l’amortissement du bien immobilier et du mobilier.
L’amortissement en LMNP
L’un des principaux avantages du régime réel réside dans la possibilité d’amortir la valeur du bien (hors terrain) et du mobilier sur leur durée d’utilisation (généralement 20 à 30 ans pour l’immobilier, 5 à 10 ans pour le mobilier). L’amortissement vient ainsi diminuer le résultat fiscal imposable, permettant souvent de neutraliser l’imposition sur les revenus locatifs pendant de nombreuses années.
La réforme : réintégration des amortissements lors de la revente
Avant la réforme : un mécanisme avantageux
Jusqu’à récemment, les plus-values réalisées lors de la revente d’un bien en LMNP relevaient du régime des plus-values des particuliers. Cela signifiait que l’amortissement pratiqué n’était pas réintégré dans la base de calcul de la plus-value. Autrement dit, le bailleur pouvait bénéficier de l’avantage fiscal de l’amortissement pendant la détention du bien, puis profiter d’une taxation plus clémente lors de la cession (impôt sur la plus-value des particuliers, avec abattement pour durée de détention).
La nouvelle donne : réintégration des amortissements
La dernière réforme vise à aligner la fiscalité de la revente d’un bien LMNP sur celle applicable aux professionnels. Désormais, lors de la cession d’un bien ayant bénéficié du régime LMNP au réel, les amortissements pratiqués durant la période de location doivent être réintégrés dans le calcul de la plus-value. Autrement dit, la plus-value imposable est calculée à partir du prix d’acquisition diminué des amortissements déduits, ce qui conduit mécaniquement à augmenter la base imposable.
Ce changement marque une rupture importante, puisque l’investisseur qui a profité de l’amortissement verra une part significative de cet avantage « rattrapée » au moment de la revente.
Conséquences pour les investisseurs :
• Fiscalité potentiellement alourdie : l’imposition sur la plus-value sera supérieure, notamment pour ceux ayant amorti de manière significative leur bien sur la période de détention.
• Anticipation nécessaire : Il est crucial d’intégrer cette réintégration dans sa stratégie patrimoniale et de projection de rendement.
• Comparatif avec l’ancien régime : L’attrait fiscal du LMNP, s’il demeure intéressant pour l’absence d’imposition sur les revenus locatifs pendant la phase de détention, est désormais relativisé par la fiscalité à la sortie.
Exemple illustratif
Prenons le cas d’un investisseur ayant acquis un appartement en 2012 pour 200 000 €, amorti à hauteur de 70 000 € sur 10 ans, et le revendant en 2025 pour 300 000 €. Avant la réforme, la plus-value imposable était de 100 000 € (différence entre prix de vente et prix d’achat, corrigée par les abattements). Désormais, il faudra retirer les 70 000 € d’amortissements du prix d’acquisition, soit : 300 000 € - (200 000 € - 70 000 €) = 170 000 € de plus-value à déclarer, soit un impact fiscal significatif (avant abattements pour durée de détention).
Par contre, si ce même investisseur avait acquis ce bien en 1994, il pourra bénéficier d’une exonération totale de la plus-value grâce aux abattements pour durée de détention (abattement progressif à partir de 5 ans de détention jusqu’à une exonération totale au-delà de 30 ans).
Conseils pratiques pour les bailleurs
• Analysez la rentabilité nette après impôt : La rentabilité brute ne suffit plus à juger de l’intérêt d’un investissement en LMNP. Il faut intégrer la fiscalité à la sortie.
• Anticipez la durée de détention : Plus la durée de détention est longue, plus l’amortissement cumulé à réintégrer sera important. Cependant, les abattements pour durée de détention sur la plus-value des particuliers peuvent atténuer l’impact fiscal si la revente intervient au-delà de 22 ou 30 ans.
• Envisagez la diversification : Il peut être opportun de diversifier ses investissements immobiliers (location nue, SCPI, etc.) pour lisser l’exposition fiscale.
• Faites-vous accompagner : L’accompagnement par un professionnel (expert-comptable, conseiller en gestion de patrimoine) est plus que jamais recommandé pour optimiser la gestion et la transmission de votre patrimoine immobilier.
Conclusion
La LMNP reste un outil d’investissement attractif pour qui recherche des revenus complémentaires tout en profitant d’une fiscalité optimisée, surtout durant la période de détention. Cependant, la réforme relative à la réintégration des amortissements lors de la cession du bien modifie substantiellement l’équilibre économique. Il est désormais essentiel d’intégrer cette nouvelle donne dans toute stratégie d’investissement patrimonial. Une analyse fine, tenant compte de l’ensemble des paramètres fiscaux, économiques et personnels, s’impose pour continuer à profiter au mieux des opportunités offertes par la location meublée.

Me Fabrice Michel
Avocat Fiscaliste



